Papaji
: Ce n'est pas vrai. C'est la chose la plus
facile qui soit. Ce n'est pas difficile parce que
c'est ici, juste maintenant.
Question : Mais le mental est très
actif.
Papaji : Je ne parle absolument pas du
mental. N'utilisez pas votre mental. N'en faites
rien et voyons où vous aboutissez.
Question : Les mots que vous articulez ont
dû être précédés
de pas mal de pensées.
Papaji : Je ne suis pas d'accord.
Question : Vous devez penser pour formuler
vos pensées.
Papaji : D'où viennent les mots que
vous utilisez en ce moment ? Je vais vous le dire :
du vide inconnu. Pouvoir parler ainsi est pour tous
un droit acquis dès la naissance.
Question : Lorsque je vous pose une
question, votre cerveau doit examiner mes mots. Il
doit sélectionner parmi tout votre savoir et
tout votre vécu pour donner une
réponse.
Papaji : Mon vécu est que chaque fois
que je parle je n'utilise rien qui soit
emmagasiné dans la mémoire.
Question : Mais les souvenirs sont quand
même présents, à un niveau non
conscient.
Papaji : Oui, à un niveau non
conscient. Allez vers ce niveau non conscient et
sautez dedans.
Le passé et le futur sont fondamentalement
identiques. Tous deux sont le mental. Si vous
demeurez uniquement dans l'instant présent,
vous n'avez absolument rien à faire avec le
passé. La mémoire se
réfère aux choses du passé. Le
mental est également le passé, une
collection d'images représentant ce qui est
déjà parti. Quand vous parlez, vous
faites toujours appel aux images du passé.
Jamais je ne creuse le passé pour trouver la
réponse à une question. Les questions
que vous allez poser viendront de votre mental,
mais ma réponse ne viendra pas de la
mémoire. Tout le monde peut le faire. Tout
le monde peut parler ainsi.
Question : Est-ce simplement être plus
spontané ?
Papaji : C'est être absolument dans le
présent. Traversez la vie sans
pensées, sans pensées
préconçues. Cela marche
instantanément. Ne pas avoir d'idées
préconçues s'appelle l'illumination.
À présent, posez vos questions.
Question : Quand j'essaie de penser à
une question, je dois fouiller mon mental, mon
passé. Pour formuler une question je dois me
demander : "Qu'est-ce que je ne comprends pas ?
Qu'ai-je besoin de savoir ? Quelles questions
pourraient être utiles ?" Pour trouver les
réponses je dois chercher dans ma
mémoire, dans mon mental, dans mes
expériences passées. Je ne peux
même pas formuler une question sans faire
cela.
Papaji : Ce n'est pas un
problème.
Question : Si nous sommes totalement
présents, si nous vivons la totalité
de cet instant, il n'y aura plus de raison de
parler.
Papaji : Dans la vacuité vous pouvez
encore parler et y être 200% plus efficace.
Tout travail peut être fait plus efficacement
à partir du vide. Vous ne connaissez pas
cela parce que vous n'y êtes jamais
allé. Sautez tout d'abord dans la
vacuité puis voyez comment vous
répondez.
Je suis entièrement d'accord avec vous quand
vous dites que vous pensez et posez les questions
à partir de votre mémoire. C'est
parce que vous n'avez pas encore sauté en
avant dans cette vacuité. Allez à
cette vacuité et parlez. En ce lieu, votre
question et ma réponse seront toutes deux
dans le présent.
Question : Mon mental est toujours actif,
car chaque fois que vous parlez, je juge :
"Ça c'est logique... ça, ça ne
tient pas debout..."
Papaji : N'essayez pas d'être logique
en quoi que ce soit.
Question : Il y a quelque chose dans mon
mental qui me dit : "Attendez un instant, ici
ça sonne faux. Je ne comprends pas."
Papaji : Vous parlez à partir d'un
niveau mental. Votre compréhension vient
d'un niveau particulier. Je dis : "Sautez en ce
lieu où il n'existe pas de niveau du
tout."
Question : C'est difficile.
Papaji : Ça c'est un mot que vous
avez entendu ou lu dans le passé.
Maintenant, dans cet instant présent,
n'utilisez pas le mot "difficile". N'allez pas vers
le passé, vers vos expériences
passées. Plongez dans l'inconnu. De
là, parlez-moi, posez-moi une question.
Question : D'accord, cela semble être
la chose à faire. Alors la pensée me
vient : "Je veux le faire, je veux laisser mes
idées préconçues, je veux
laisser mes pensées conditionnées. Je
veux vivre et fonctionner d'une manière
différente." Mais comment faire ? Je suis
contrôlé par toutes ces
pensées, par le mental qui me dit : "Est-ce
juste ? Est-ce bien utile ?" Comment lâcher
prise et simplement être ici-maintenant ?
Papaji : Vous dites : "Je veux le faire."
Cette attitude est erronée parce que pour
l'obtenir vous ne devez rien faire du tout.
Lâcher prise n'implique pas de
réaliser quoi que ce soit de neuf. Vous
n'avez pas à essayer d'atteindre un nouvel
état, car même en ce moment vous
êtes ce que vous cherchez. Vous ne pouvez
travailler ou faire un effort pour être
vous-même, car à quel moment ne
l'êtes-vous pas ? Toutes ces tentatives,
cette recherche, ce désir de
réalisation et d'accomplissement ne sont pas
naturels. Ce que vous obtenez par ces
activités non naturelles sera perdu
tôt ou tard, mais vous ne pouvez jamais
perdre votre propre Soi. Découvrez qui vous
êtes en cet instant et mettez fin à
toutes ces recherches inutiles.
Question : Je suis pure présence.
Papaji : Absolument exact. Dans ce cas,
d'où viennent les questions ? Aucun
problème n'existe dans la pure
présence. Tout y est inclus. Vos gestes, vos
paroles, tout ce que vous faites vient de cette
pure présence. Et ceci est au-delà de
tous les niveaux de pensée. C'est un non
niveau. Soyez en ce lieu, parlez à partir de
là, accomplissez toutes vos activités
habituelles, quotidiennes, à partir de
là. Soyez cette conscience, soyez cette
vacuité.
Question : La bonté, la sagesse, la
compassion, se trouvent-elles en ce lieu ?
Proviendront-elles naturellement de là ?
Papaji : En ce lieu, la sagesse, la
compassion et la bonté sont
inhérentes à votre propre nature.
Lorsque vous mangez, votre main prend la nourriture
et la porte à votre bouche. La bouche
n'éprouve pas de reconnaissance pour la
main. Elle ne dit pas : "Merci, Madame la Main.
Vous m'avez nourri. Sans vous j'aurais eu faim."
Quand vous vivrez dans ce lieu, vous
coopérerez avec l'humanité de la
même manière que la main
coopère avec la bouche. Vous
éprouverez de la compassion envers tous les
êtres, vous serez serviable et bon pour tous,
mais en même temps vous ne sentirez jamais :
"J'ai de la compassion, je suis bon." Vos actions
auront leurs racines dans la bonté, l'amour
et la compassion, mais vous ne serez jamais
conscient que vous les accomplissez pour aider les
gens.
Question : Voulez-vous dire qu'il n'y aura
pas d'intention consciente ?
Papaji : C'est l'état naturel. Dans
cet état vous aidez tout le monde, tous les
êtres, et vous le faites automatiquement.
Question : Tout le monde a-t-il cette
même nature ?
Papaji : Oui, la même nature.
Question : Qu'en est-il de ces gens dont la
nature est laide, qui ne sont pas bons ?
Papaji : Je ne parle pas de cette nature
là. Je parle de la nature fondamentale qui
est présence, lumière, sagesse,
humanité. Pour avoir de la compassion, vous
devez en premier lieu vivre Cela.
Question : C'est notre nature à tous
? Ressentez-vous Cela comme votre nature
intérieure ?
Papaji : Nature intérieure. Nature
cosmique. Nature éternelle. La nature.
Question : Ne nous mettons-nous pas en
travers du chemin ? Le mental analytique et tout le
reste se mettent-ils en travers du chemin ?
Papaji : Toutes ces choses ne sont que
confusion. Ne les nommez en aucune façon
"nature". Elles ne sont pas naturelles.
Question : Des gens violent, tuent, volent.
D'où ces impulsions viennent-elles ?
Papaji : Elles viennent d'actions non
naturelles, malpropres. Elles s'acquièrent
de la société. La
société nous dit de nous venger et
d'agir violemment de toutes les façons. Ce
ne sont pas des manifestations de la nature du Soi.
Même les assassins ont des remords. Ils
savent, d'une façon ou d'une autre, qu'ils
ont violé une loi naturelle.
Question : Les prisons sont pleines de
criminels reconnus coupables. Je ne pense pas que
la plupart d'entre eux ressentent de la honte ou du
remords d'avoir tué, volé ou
violé. Ils sentent que c'est leur nature.
Ils ne sont pas en harmonie avec les autres. Ils
sont égoïstes, ils ne veulent que
posséder pour eux-mêmes. Les gens ont
des natures diverses. Il n'existe pas de nature
commune.
Papaji : Je ne suis pas en train de parler
de natures diverses. Celles-ci surviennent en
raison de circonstances extérieures. La
nature dont je parle est la présence, notre
propre nature intérieure. Un crime violent
n'est pas une expression de cette nature
intérieure.
Même votre nature extérieure vous
apprend ce qu'est un comportement juste ou
erroné. Vous savez qu'il n'est pas naturel
de tuer un homme ou de violer un
bébé. Vous savez que vous allez
contre nature en le faisant. Il vous faut payer
lorsque vous transgressez des lois naturelles par
des actes de violence. Si ce n'est
immédiatement, ce sera à une date
ultérieure.
Question : Vous dites : "Lâchez prise,
soyez, tout simplement." Cela semble juste et
j'approuve ce que vous dites. Cependant,
après vous avoir entendu et approuvé,
je retourne à mes programmes mentaux,
à mon conditionnement, à mon mental
réactif. Je me demande pourquoi. Je sais que
je ne devrais rien faire et cela paraît
très simple. Comment puis-je apprendre
à faire cela de plus en plus et à
demeurer tout le temps ainsi ?
Papaji : Vous n'avez pas compris ce que
j'essaie de vous dire. Vous parlez encore d'obtenir
quelque chose dans le futur. Vous parlez
d'être spontanément dans le
présent. Pourquoi devoir attendre et
programmer votre venue dans le "maintenant", dans
le moment présent? Le fait d'essayer vous en
fait sortir et aller dans le futur.
Question : En ce moment mon mental se trouve
en vingt endroits différents.
Papaji : Le mental ne peut aller en
différents endroits en même temps. Il
ne peut qu'aller dans une direction
particulière. Dites-moi où est votre
mental à présent. À quoi
pensez-vous en cet instant ? Où va votre
mental maintenant ? Montrez-le moi.
Question : J'écoute ce que vous
êtes en train de dire.
Papaji : Bien. Vous écoutez ce que je
dis. Je vais travailler là-dessus. Ce que
vous avez écouté, où cela
est-il tombé ?
Question : C'est tombé dans la partie
de moi-même qui juge ce que vous dites. Je
juge ce que vous êtes en train de dire.
Papaji : "Je juge". "Je" est le sujet et
"juge" le prédicat. Mainte nant, au-dedans
de vous, d'où ce "je juge" a-t-il surgi ?
"Je juge" ce sont deux mots. Inversez la phrase :
"Juge je". D'où ce "je" vient-il ? Remontez
à sa Source. Chaque fois que vous me poserez
une bonne question, ce sera la réponse.
C'est la réponse à tous les
problèmes.
... Vous êtes soudain devenu silencieux.
Question : J'essaie de trouver une
réponse.
Papaji : Vous êtes Ron, et vous,
Henry. M. Henry, vous n'avez rien dit depuis un
moment. Dans ce silence, le "je juge"
était-il présent ou non?
Question : Il ne l'était pas.
Papaji : Bien. Cette déclaration
n'était pas présente. Et vous
étiez silencieux parce que vous ne pouviez
trouver de réponse à la question que
je vous avais posée. À cet
instant-là, qui étiez-vous ?
... Maintenant vous êtes redevenu silencieux.
Vous êtes à nouveau silencieux.
Question : Je sens...
Papaji : "Je sens" deux mots. Que
signifie "sens" ? "Je sens" deux mots.
Qu'est-ce qui est antérieur au "sentiment" ?
Qui est antérieur à sentir ?
Question : Les mots me manquent.
Papaji : Bien. "Les mots me manquent".
Qu'est-ce que ce "me" à qui les mots ont
manqué ?
Question : Derrière les
pensées, quelque part il y a...
Papaji : Non ! Non ! Gardez votre silence.
C'est une répétition de la question.
Qui est ce "je" qui a un sentiment ? À qui
ce sentiment survient-il ? Qui est ce "je" ?
Où est-il ? Poursuivez ce "je"
jusqu'à son lieu d'origine et tous les
problèmes seront résolus. Qui est ce
"je" ? La réponse à cette question
est la réponse à toute recherche. Le
"je" est-il ces lunettes ? Le "je" est-il ce corps
? Est-il couvert de peau, a-t-il des membres ?
Question : Non.
Papaji : Qu'est ce "je" ? Vous avez dit "je
sens" de nombreuses fois. En premier lieu,
élucidons le problème de ce qu'est ce
"je". À qui ce sentiment survient-il quand
vous dites "je sens" ? À "je". Qu'est ce
"je" ? Approfondissons le sujet. Faisons con
naissance, devenons ami avec notre propre Soi.
Essayez de le faire maintenant ! Il n'est pas
éloigné. Mon cher ami, il n'est pas
à San Francisco. Où se trouve le "je"
? À quelle distance de vous est situé
le "je" ? À quelle distance ?
Question : Il est quelque part ici, mais
je...
Papaji : [montrant la poitrine]
suivez sa trace ici. Enlevez ce qui est à
l'extérieur et pénétrez en cet
endroit. Faites-le maintenant ! C'est très
concret. Faites-le ! Qui est ce "je" ?
Question : Il n'y a pas de "je".
Papaji : Pas de "je" ? Dans ce cas le
problème est résolu. S'il n'y a pas
de "je" vous poserez les questions
spontanément, vous penserez
spontanément et vous fonctionnerez
spontanément. Vous serez spontanément
plein de compassion.
Question : Parce qu'en lui rien ne se
réfère à quoi que ce soit. Il
n'y a rien derrière.
Papaji : Rien derrière. C'est
juste.
Question : [riant] C'est si facile
de lâcher prise.
Papaji : Exact. C'est si facile de
lâcher prise.
Question : Il n'y a pas de "je", ou de
croyance, ou de sentiment... Il n'y a pas de "je".
Je crois. Puis-je utiliser le mot "je" d'une
manière spécifique ? Lorsque vous
êtes vivant vous avez un "je", c'est la force
de vie.
Papaji : Je ne suis pas en train de parler
du "je" physique, de quelque chose qui aurait ou
qui serait la vie. Je parle du "je" psychologique.
Vous êtes actuellement en train de parler :
d'où ces mots proviennent-ils ? Vous
ressentez "je parle, je travaille, je pense".
Quelle est cette entité, ce "je" auquel vous
attribuez toutes ces activités ? Qui dit
tous ces mots ? D'où viennent-ils ?
Question : Le "je" semble que être
quelque chose que nous fabriquons.
Papaji : Quelque chose que vous fabriquez.
Bon, alors quelle est l'origine de la "fabrication"
?
Question : Je ne sais pas. Dites-le moi.
Papaji : Non. Je veux que vous y alliez
vous-même. Je ne vous le dirai pas. Je ne
peux pas vous le dire.
Question : Je...
Papaji : Un mot. [rires] M. Henry,
ça c'est une phrase complète.
Question : Nous sommes partis de quatre
phrases pour arriver à un mot. Il ne reste
plus beaucoup de chemin à parcourir,
maintenant.
Papaji : Est-ce difficile de demeurer dans
ce seul mot, M. Henry ?
Question : Puis-je percevoir ce "je" ?
Papaji : Non, car c'est la fontaine, la
Source de "je pense". Vous dites : "Je vais penser,
je vais faire ceci et cela." Je dis : "Retournez
simplement à ce "je"." Si vous retournez
à ce "je", qu'est-ce qui sera là
?
Question : Là, il n'y a pas de
questions. Là, les questions n'ont pas
d'importance.
Papaji : Il peut y avoir mille et une
questions, l'une après l'autre. Mais ce
""je" conscience" n'en est jamais affecté ni
par quoi que ce soit d'autre.
Alors les questions peuvent-elles être encore
là ?
Les questions sont là. L'activité est
là. Tout est là. Mais vous,
vous-même, vous n'êtes pas là.
Quand vous mettez un "je" là où il
n'a pas sa place, la confusion, l'agitation, les
perturbations et même les guerres
apparaissent. Quand le "je" n'est pas là,
quelque chose demeure toujours.
Question : Le mot "survie" m'est venu
à l'instant. Je pense que "je"
apparaît et persiste en raison de notre
instinct de survie, d'autoprotection. Quand le "je"
s'en va, qu'est-ce qui survit, qu'est-ce qui reste
?
Papaji : C'est une autre question.
Examinons-la. Si nous retournons à notre
Source, nous atteignons la conscience même.
Faisons-le maintenant. Retournons à cette
Source. À l'instant même. Ce n'est pas
très difficile. Ne faites rien d'autre,
n'allez nulle part ailleurs. En cet instant du
temps, soyez cette conscience. Vous êtes cet
Etre en cet instant. Vous n'avez pas à
l'étudier ou à le rechercher.
Question : Tout mon être se relie
à vos paroles. Je comprends parfaitement et
j'admets que c'est ce que je dois faire. J'entends
ce que vous dites, je comprends la
nécessité de le faire, je veux
même que cela se produise, mais je ne peux
toujours pas lâcher le concept de "je".
Papaji : Je ne vous dis pas de lâcher
prise. Je ne vous demande pas de lâcher quoi
que ce soit. Je vous demande seulement d'être
présent à votre propre sentiment
d'être. Mettez votre visage dans votre propre
être. Voyez votre visage dans le miroir de la
conscience. Au lieu de courir vers
l'extérieur, faites retraite vers
l'intérieur. Retournez à cette
conscience et voyez ce qui est là. Là
vous verrez votre propre visage, vous le
reconnaîtrez et vous l'aimerez.
Etablissez-vous là et tout sera tellement
simple et tellement naturel pour vous.
À présent, M. Henry, je vous demande
quelque chose de plus. Lorsque vous prononcerez
votre prochaine phrase, voyez, je vous prie,
d'où elle prend naissance. D'où
s'élève-t-elle ? Quand je vous
emmènerai là, nous serons très
près de la solution. À
présent, tandis que vous me parlez, voyez le
processus dans sa totalité. D'où
surgit-elle ?
Question : Regarder d'où elle se
lève me donne la compréhension.
Papaji : Non ! Non ! Rejetez la
compréhension. Mon cher Henry, retournez
à la Source de la compréhension.
Question : Ce que vous me dites est
très difficile pour moi et également
très déconcertant.
Papaji : Non. Non. Faites-le tout d'abord,
puis énoncez vos difficultés
après coup. Vous ne l'avez pas encore fait.
Retournez à la Source de votre être,
d'où tout vient. Tout vient de
l'intérieur de vous et de nulle part
ailleurs. Tout naît de là, le
passé, le présent, le futur. Tout est
localisé là. C'est là que vous
devez aller.
Question : J'essaie. Je ne peux la
trouver.
Papaji : N'essayez pas. Vous ne la trouverez
ni dans le passé, ni dans le futur.
N'essayez pas. Abandonnez tous vos efforts.
L'avez-vous fait ? Vous dites : "J'essaie juste
maintenant" et je dis : "Abandonnez tout essai".
L'avez-vous fait ?
Question : Pendant une seconde
peut-être, pendant une seconde, oui.
Papaji : Bien. Cela suffit. Cette seconde
est tout à fait suffisante. Pendant une
seconde vous avez renoncé à tout
essai. Dans cette seconde, qui êtes-vous
?
Question : Je ne sais pas.
Papaji : Excellent ! Excellent ! Pouvez-vous
rester dans cette seconde et me dire : "Je sors de
cette seconde ?" Expliquez-moi comment vous quittez
cette précieuse seconde. Comment en
sortez-vous ?
Question : Ça c'est facile. Je
retourne au concept de "je". C'est si facile de
redevenir "je".
Papaji : Oui, ce "je" est juste un concept.
Mais je parle de cette seconde où il n'y a
pas de "je", où il n'y a rien. Je parle de
cet instant présent. Si vous êtes dans
cette seconde que percevez-vous ?
Question : L'ouverture.
Papaji : Excellent. Voulez-vous l'ouverture
ou la fermeture ? Que préférez-vous
?
Question : L'ouvert.
Papaji : C'est notre point de départ.
Veuillez m'excuser d'agir ainsi avec vous.
Qu'est-ce qui se présente en vous maintenant
? Quel concept avez-vous en tête ? Quelle
difficulté ? Quel problème ?
Question : De l'accepter
entièrement.
Papaji : Soyons beau joueur. Quand nous
arrivons à une solution nous devons nous y
tenir. En premier vous avez dit que vous viviez
l'ouverture. Puis vous avez dit : "Cela m'est
difficile." Où êtes-vous allé
après cette première
déclaration : "Je suis ouvert ?" Qu'en
avez-vous fait ? Comment l'avez-vous rejetée
?
Question : Je l'ai fermée.
[rires]
Papaji : La fermeture, c'est ce qui se
passe à Wall Street. Quand vous dites : "Je
suis ouvert", à cet instant vous êtes
heureux. L'êtes-vous également au
moment de dire : "Je suis fermé ?"
Choisissez entre les deux ! Choisissez ! Allons !
Il n'y a aucun choix dans l'ouverture. Elle est
sans choix.
Question : Pas de choix.
Papaji : Donc, ne fermez pas. Restez ouvert.
N'est-ce pas raisonnable ?
Question : Très.
Papaji : Merci. Prenons une tasse de
thé et poursuivons notre conversation.
Question : Lorsque nous remarquons
"fermé", "pas ouvert"...
Papaji : Quand vous remarquez d'où
vient ce concept de "fermeture", vous êtes
à nouveau dans la présence.
Question : Est-ce aussi simple que cela
?
Papaji : Cela semble-t-il également
aussi simple à M. Henry ? C'est si simple,
si naturel. Et c'est ce que vous êtes.
Qu'avez-vous à faire pour être ainsi ?
Quel effort devez-vous faire pour être ainsi
?
Question : Pas d'effort.
Papaji : Quand vous ne faites pas d'effort,
qui êtes-vous ?
Question : [rires] La question
suivante se présente : "Que me faut-il
savoir d'autre ? Je veux savoir."
Papaji : Soyez en certain : là, en ce
lieu, toutes les questions trouvent leur
réponse.
Question : Le concept "je" veut savoir, veut
comprendre, veut faire un effort. Quand je me sens
mal, je sais que je suis
décentré.
Papaji : Les questions qui viennent de l'ego
ne feront que créer de la confusion. Nous
sommes arrivés en cet autre endroit
où le "je" n'apparaît pas.
Actuellement vous parlez à partir de
là.
Question : Des questions naissent encore de
cet endroit, mais pas les problèmes.
Papaji : Les questions sont
présentes, les mêmes
difficultés sont présentes, mais pas
les problèmes.
Question : Aurai-je des rapports
différents avec eux ?
Papaji : Vous êtes relié
à tous les problèmes. De cette
position avantageuse vous les résolvez d'une
manière beaucoup plus sage.
Question : Qu'est-ce que l'ego ?
Papaji : L'ego n'est pas le Soi. Quand vos
actions ne sont pas fondées sur le Soi,
toutes sortes de mauvaises attitudes apparaissent :
l'orgueil, l'hypocrisie, le calcul politique. En
fonctionnant par l'ego vous acquérez du
savoir et des identités données par
vos voisins, vos amis, vos prêtres et vos
professeurs. Ce n'est pas votre vraie nature. Vous
avez été simplement
conditionné à croire que c'est ce que
vous êtes. Vos professeurs, vos
prêtres, vos parents, la
société, tous vous ont fait
ça.
Question : C'est pourquoi c'est si
difficile. Mon mode de pensée normal, ma
présence habituelle passent par l'entremise
de ce conditionnement.
Papaji : Vous devez sortir de ce
conditionnement.
Question : Le matin à mon
réveil je regarde ma montre. Je pense : "Il
est huit heures, je dois faire ceci, je veux faire
cela." Toutes les activités sont
filtrées à travers ce
conditionnement.
Papaji : Si vous dites que ces
pensées vous conditionnent, alors vous
êtes conditionné. Si, au lieu de cela,
vous reconnaissez qu'elles naissent de la Source
inconditionnée, elles ne vous conditionnent
pas. Une même activité peut être
conditionnée ou inconditionnée. En ce
moment nous prenons le thé. Une
activité se poursuit mais elle ne nous cause
aucun obstacle.
Question : Nous pouvons donc avoir la
même routine tout en étant
différemment relié à elle. Il
n'y aura alors pas de problème.
Papaji : En étant relié
différemment, il n'y aura "pas de
problème". Faites face. Adoptez une approche
différente. Ne le faites pas avec un
revolver en main.
Question : Je trouve que ce qui donne de la
valeur à vipassana c'est d'apprendre
à voir les pensées comme
impersonnelles. Nous étudions la
façon dont nous nous identifions aux
pensées, nous voyons que la pensée
"je" est également un concept. Avec
vipassana, qui est la voie de la vision
pénétrante, on s'exerce à
laisser la pensée s'en aller. Si vous
apprenez à lâcher les pensées,
vous ne vous laissez plus prendre si facilement par
le concept de moi, de "je". Je trouve que vipassana
est un outil utile.
Papaji : En faisant cela on crée une
trinité : le méditant, la
méditation et l'objet de méditation.
Cette trinité s'entretient. Je veux que vous
soyez dans l'unité. Soyons un, en
totalité, et non divisés entre
méditant, méditation et objet de
méditation.
Question : Ils ne le sont pas. Cela ne fait
pas partie de l'enseignement, pas partie de la
voie. Je le sais par expérience. Bien que je
reconnaisse que ce que vous dites est vrai, je
pourrais dire que la méthode vipassana me
remet continuellement en mémoire que je
m'identifie aux pensées, que je crée
un moi, un "je" avec ses problèmes. Alors
les pensées s'évanouissent et cette
méthode nous rappelle que les pensées
ne sont pas réelles. Elle nous aide à
retourner au non-moi, au vide. Mais
j'apprécie néanmoins votre
manière.
Papaji : Ne vous empêtrez pas dans
vipassana, dans ce processus d'observer et de
faire. Pendant que vous êtes conscient de
mettre en pratique vipassana, demandez-vous : "Qui
est en train de faire vipassana ?" Lors de cette
pratique vous devez vous demander "Qui suis-je ?"
afin de découvrir qui est celui qui la met
en pratique.
Vous observez les objets, mais je vous demande de
les enlever. Si vous enlevez les objets, tout s'en
va. Alors seule la conscience est.
Question : Que dois-je faire pour me
souvenir de tout cela ?
Papaji : Rien. Se souvenir appartient au
passé. Pour vous souvenir, vous devez
creuser le passé pour en ramener quelque
chose.
Question : Ça, je le comprends. Tout
doit être spontané. Que faites-vous
quand vous sortez dans la rue ? Comment pouvez-vous
y être spontané ?
Papaji : Vous pouvez sortir dans la rue et
répondre à tout ce qui s'y
présente, mais sans oublier le vide. Vous ne
pouvez aller nulle part où ne soit le vide.
Vous ne voyez les objets qu'en raison du vide qui
s'étend derrière eux. Rien n'existe
sans le vide. Si vous ne pouvez aller nulle part
sans qu'il y ait la vacuité, pourquoi ne pas
accepter celle-ci dès à
présent comme étant ce que vous
êtes ?
Question : La vacuité est l'espace
vide derrière toute chose.
Papaji : C'est ce que je dis. Vous ne pouvez
l'inclure ou l'exclure. Regardez cette maison dans
laquelle nous nous trouvons. Pouvez-vous dire :
"Dehors c'est le vide, mais il n'y a pas de vide
à l'intérieur parce que c'est ma
maison ?" L'intérieur peut-il exister sans
le vide ?
Question : Alors le vide est l'état
naturel ?
Papaji : Le vide, la présence, la
sagesse, l'éveil.
Si le vide n'existait pas, il n'y aurait pas de
maison. L'intérieur et l'extérieur
sont tous les deux le vide. Nous construisons
quatre murs et appelons cela une maison. Puis nous
disons que nous vivons dedans. Mais nous ne vivons
pas entre les murs, nous vivons dans la
vacuité.
Toute connaissance vient de Cela qui est inconnu.
Et elle demeure toujours dans l'inconnu.
Connaître cela, c'est l'éveil. S'y
essayer est vipassana.
Question : Vipassana c'est chaque fois une
pratique intense pendant des mois. Il est
très difficile d'obtenir cette
compréhension.
Papaji
: Non, non, ce n'est pas un problème. Je
ne me suis pas retiré dans des grottes pour
méditer chaque fois pendant des mois. Je me
suis rendu tout simplement auprès de mon
maître et il a dit : "Ce qui apparaît
et disparaît n'est pas réel." Alors
j'ai saisi.
Question : Comment êtes-vous
arrivé à cette compréhension
?
Papaji : J'ai saisi par la grâce de
mon maître. Je n'ai fait aucun effort pour
comprendre. Instantanément, j'ai saisi.
Question : Avez-vous médité
avant de le rencontrer ?
Papaji : J'ai fait beaucoup de choses.
Dévotion, méditation, toutes sortes
de choses. Je n'ai rien laissé à
l'écart. J'ai poursuivi ma recherche
très très sérieusement. Mais
quand j'ai rencontré mon maître,
quelque chose s'est passé qui m'a fait
saisir, instantanément.
Imaginez que vous allez vous marier demain. Vous
vous rendez au marché, vous faites des
emplettes et prenez toutes vos dispositions pour la
journée suivante. Puis, en retournant chez
vous, vous traversez une forêt. Soudain un
tigre surgit juste devant vous. Qu'advient-il alors
de tous vos projets minutieux ?
Question : Ils changent rapidement.
Papaji : C'est ainsi que cela se passe, M.
Henry. Que se passerait-il si vous deviez rayer
toutes les idées concernant ce que vous avez
à faire demain, ce que vous pourriez obtenir
ou atteindre à l'avenir ? Vous avez besoin
de voir un tigre.
Question : N'importe quelle question qui se
présente paraît hors de propos. Elles
reviennent toutes au même point. Toutes ces
questions sont des tigres.
Papaji : Non, non, elles ne sont pas des
tigres.
Question : Vos questions s'imposent à
mon attention. Vous êtes mon tigre lorsque
vous me demandez "Qui suis-je ?" J'allais dans une
direction, préparant une réponse
à vous donner. Soudain, ma réponse
n'a plus d'utilité.
Papaji : Ça, c'est le tigre.
[rires]
Cela survient simplement, en ne faisant aucun
effort, en ne prêtant attention à
aucune chose extérieure. Cela ne vient pas
en lisant des livres.
[silence]
Maintenant, à quoi pensez-vous, mon cher
Henry. Maintenant, juste maintenant ?
Question : J'essaie de ...
Papaji : Non, non. Ne parlez pas d'essayer.
Dites-moi ce qui, en cet instant, apparaît
dans votre esprit ?
Question : Il y avait un espace. Il y avait
un vide.
Papaji : C'est ce que je voulais.
Question : Cela signifie que là il
n'y a rien. Donc le "quelque chose" est simplement
une erreur.
Papaji : C'est un espace vide. Vous pouvez
nommer cela "espace", vous pouvez nommer cela "la
Source", vous pouvez nommer cela "illumination",
vous pouvez nommer cela comme vous voulez.
Question : Dans cet espace il n'y a pas
d'attachement. Vous n'avez aucune idée, vous
n'avez aucune question.
Papaji : À présent, c'est lui
qui mène ! [rires] Bien ! Il a saisi
!
Question : Cela fait très longtemps
que je participe à des entretiens semblables
à celui-ci et j'ai fait beaucoup de sessions
vipassana. J'ai essayé d'expliquer cela
auparavant, mais je n'avais pas saisi le sens du
vide derrière la question.
Papaji : [riant] Je l'ai
attrapé au bon moment. Il a découvert
l'espace en lui et non ailleurs. Pourquoi
devrais-je lui poser une question à
présent?
Vous ne devriez pas oublier l'espace parce que vous
ne pouvez jamais vous en débarrasser. Vous
ne pouvez pas jeter l'espace : il est toujours
là. Vie après vie il est là.
Toutes ces vies prennent place dans cet espace.
Observez les vagues de l'océan. Certaines
sont hautes, d'autres petites, d'autres
allongées. Si vous ne regardez que les
formes, vous voyez des vagues
séparées, mais si vous regardez la
substance, vous savez qu'elles sont toutes
l'océan, toutes l'eau. Il se peut qu'il y
ait des distinctions dans votre mental, mais vous
n'êtes pas ces distinctions, ces vagues. Vous
êtes l'océan du Soi. Vous ne pouvez
pas retirer les vagues de l'océan. Vous ne
pouvez pas les séparer.
Question : Que faire quand je ne suis pas
avec vous ? Quand je suis là-bas dans le
monde et que j'oublie ? Comment se souvenir de ceci
?
Papaji : Ne vous souvenez pas ! Si vous ne
vous souvenez pas, alors ni vous ni moi ne serons
présents. En cet instant, nous sommes
ensemble et nous parlons. N'ayez aucun concept. Si
vous n'enregistrez ni n'acceptez les concepts, tout
sera bien. Vous ne serez pas là, je ne serai
pas là. Il n'y aura pas de distance et pas
de séparation.
Question : Est-ce ainsi qu'un Guru demeure
avec quelqu'un ?
Papaji : Oui, oui.
Question : Donc l'idée de distance
entre nous n'est qu'un concept. Qu'est-ce que
j'obtiendrai de plus que ce que je viens juste
d'obtenir en restant avec vous trois jours, une
semaine, deux semaines ?
Papaji : Rien de nouveau.
Question : Juste un peu plus ?
Papaji : Non, non. Rien de plus et rien de
moins.
Question : Ceci.
Papaji : Je ne l'appellerai même pas
"ceci". Si je le fais, il y aura confusion avec
"Cela".
Question : La réponse et la
compréhension que vous avez
communiquées pendant les dernières
minutes... Mon mental analytique...
Papaji : Vous pouvez encore utiliser le
mental qui analyse. C'est toujours possible. Mais
dès maintenant les réponses viendront
de l'espace "je sais".
Question : Je peux voir comment mon mental
fonctionne avec les mots, les pensées, les
idées. Et je peux voir comment je leur donne
une réalité. Je peux voir maintenant
comment je n'avais jamais donné de
crédibilité ou de
compréhensibilité au vide, à
l'espace derrière cette
réalité. Je me suis identifié
à une chose nommée "moi" et aux
pensées, aux concepts, aux souvenirs, aux
projec tions de "moi". Maintenant je comprends et
je sais que c'est le vide derrière tout cela
qui est vraiment utile.
Papaji : Vous pouvez maintenant penser et
faire comme vous le voulez.
Question : Ce n'est pas moi, et ce n'est pas
vous.
Papaji : L'espace, la Source, le vide. Vous
ne pouvez rejeter ce qui est. Les vagues sur
l'océan semblent se combattre et s'entre
choquer, mais elles sont toujours
l'océan.
Question : Je peux identifier l'ego
dit : "C'est mon idée, c'est ma question,
c'est ma réponse." Ça, c'est l'ego.
Mais l'ego ne peut identifier, accréditer,
être fier de l'espace.
Papaji : Quand vous le nommez espace, il n'y
a pas d'ego. Quand vous sautez dans l'espace, tout
est bien. Je n'utilise aucun mot pour
décrire cet espace. Simplement il est.
Question : Donc l'ego crée les
problèmes. L'ego ou le sens du "je" ne peut
en aucune façon comprendre l'espace ou le
vide parce que celui-ci est antérieur au
surgissement du "je".
Papaji : [riant] Il l'explique
très bien. Cela se connaît simplement
Soi-même.
Question : Quand je vous ai appelé
aujourd'hui, je voulais savoir quels étaient
vos projets d'avenir, je voulais savoir où
vous trouver afin que je puisse revenir vous voir.
À présent je me demande si c'est
nécessaire. J'aimerais être avec vous
plus longtemps. Cependant je me demande :
allons-nous être ensemble plus longtemps
?
Papaji : Non, je ne pense pas que vous ayez
besoin de passer plus de temps avec moi. S'il y a
un problème, résolvez-le dès
mainte nant. Je vous aiderai ici. Assurez-vous de
n'avoir aucun problème avant de partir. Si
vous n'avez pas de problème, pourquoi
aurions-nous besoin de nous rencontrer à
nouveau ? Si vous êtes vraiment sans
problème, alors nous sommes toujours
ensemble. Ne gaspillez pas votre temps à
revenir me voir !
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